Chaque nuit, j’entendais des bruits étranges venant de notre garage.Au début, je n’y prêtais pas attention. Un léger tintement métallique, un grincement, parfois un bruit sourd.


Je pensais simplement que mon mari réparait la voiture ou s’était trouvé un nouveau passe-temps. Mais plus les jours passaient, plus son comportement devenait inquiétant.

Les enfants dormaient profondément quand il se levait sans un mot, prenait sa lampe de poche et descendait au garage. Il revenait toujours très tard, le visage fatigué, les yeux cernés. Sur ses manches, il y avait souvent des taches rougeâtres. Quand je lui demandais ce que c’était, il répondait froidement :
— Je travaille. Ne pose pas de questions.
Et un soir, quand j’ai insisté, il m’a lancé un regard glacial :
— Ce n’est pas ton affaire.

Ces mots m’ont glacée. J’avais l’impression de ne plus reconnaître l’homme avec qui je vivais depuis tant d’années. Quelque chose avait changé, et ce quelque chose me faisait peur.

Un après-midi, pendant qu’il était au travail, j’ai pris une décision. Je devais savoir. Je suis sortie dans la cour, j’ai pris les clés du garage et me suis arrêtée devant la vieille porte rouillée. Mon cœur battait si fort que j’avais du mal à respirer. J’ai tourné la clé. La porte a grincé.

Une odeur de métal et d’humidité m’a frappée au visage. Il faisait sombre, presque étouffant. J’ai avancé de quelques pas et, peu à peu, mes yeux se sont habitués à la pénombre. Ce que j’ai vu m’a glacé le sang.

Sur le sol, il y avait des outils, des seringues, des bocaux remplis d’un liquide sombre. J’ai baissé les yeux et compris que ce liquide, c’était du sang. Mon corps s’est figé. Je voulais partir, mais mes jambes refusaient de bouger.

Je me suis approchée de la table, où quelque chose était recouvert d’une bâche grise. En tremblant, j’ai soulevé un coin du tissu — et j’ai hurlé.
Sous la bâche se trouvait une silhouette humaine. Pas une poupée. Une figure presque réelle, avec une peau pâle, des cheveux, des cils… tout.

J’ai reculé, le souffle coupé. Sur le mur, des dizaines de photographies étaient accrochées : des visages d’hommes, de femmes, d’enfants. Sous chaque photo, une date et une courte phrase écrite de sa main : « terminé », « presque fini », « prochaine étape ».

Sur la table, un carnet était ouvert. Les pages étaient couvertes d’une écriture rapide, nerveuse. Les premières lignes semblaient anodines — listes de matériaux, de produits chimiques — puis les mots devinrent fous : « Le sujet bouge encore », « la peau doit être fixée plus vite », « les cris sont insupportables, mais nécessaires ».

Et soudain, une voix derrière moi :
— Qu’est-ce que tu fais ici ?

Je me suis retournée. Il était là, debout dans l’encadrement de la porte, tenant un long couteau à la lame fine. Ses yeux étaient vides.
— Tu n’aurais jamais dû entrer ici, — dit-il calmement. — Encore quelques nuits, et j’aurais terminé.

— Terminé quoi ?! — ai-je crié, la gorge sèche.

Un sourire effrayant s’est dessiné sur son visage.
— Je redonne vie à ceux que la mort a pris. Je les rends parfaits.

Je voulais reculer, mais mes jambes tremblaient. Puis mon regard s’est posé sur un autre drap, posé dans un coin. J’ai tiré dessus d’un geste brusque. Et là, j’ai vu son visage. Celui de notre voisine — celle qui avait disparu le mois dernier. Elle semblait dormir. Trop belle. Trop réelle.

— Elle ne souffre plus, — murmura-t-il. — Bientôt, toi aussi, tu connaîtras la paix.

J’ai crié, attrapé une clé à molette posée sur l’établi et l’ai frappé de toutes mes forces. Il a vacillé, j’ai couru dehors, pieds nus, dans la nuit glaciale.

Quand la police est arrivée, il n’y avait plus rien. Ni corps, ni outils, ni carnet. Seulement l’odeur du sang séché et le silence.

Il a disparu. Depuis cette nuit, personne ne l’a revu.

Mais parfois, vers minuit, j’entends à nouveau ce bruit. Ce léger tintement métallique, quelque part près de la maison. Et le matin, sur la vitre de la cuisine, je trouve la trace d’une main.

Alors je comprends qu’il est revenu. Qu’il n’a jamais vraiment cessé de travailler. Et qu’un jour, il viendra me chercher pour « terminer son œuvre ».

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