Aujourd’hui, j’ai eu 97 ans. Personne n’a appelé. Personne n’a écrit. Juste un petit gâteau, une flamme, et un message envoyé dans le silence


Il s’est réveillé comme chaque matin. Lentement.
Le plafond est le même qu’hier. La lumière entre par la fenêtre qui donne sur la rue. En bas, il y avait autrefois une quincaillerie. Fermée depuis des années.
Mais c’est là qu’il vit. Une petite pièce, un lit, une bouilloire, une chaise, et cette fenêtre.

C’est sa préférée.
Par elle, il regarde passer les bus. Il dit que les bus, c’est comme le temps : ils vont, ils viennent, et personne ne les attend vraiment.

Un anniversaire comme les autres… ou presque
Aujourd’hui, c’est son anniversaire. 97 ans.
Aucune lettre. Aucune sonnerie. Aucune voix familière.
Le propriétaire, un homme sec mais honnête, ne lui a rien dit. Peut-être ne le savait-il pas. Peut-être s’en moquait-il.

Il est sorti comme tous les mercredis. A petits pas, jusqu’à la boulangerie à deux rues.
La vendeuse, jeune, aimable, mais distraite, lui a souri par politesse.

“C’est mon anniversaire aujourd’hui”, a-t-il dit.

Elle a répondu, presque machinalement :

“Ah, bon anniversaire !”

Il a demandé un petit gâteau à la vanille, avec des fraises.
Et puis, presque timidement, il a ajouté :

“Est-ce que vous pouvez écrire dessus : ‘Bon 97e, Monsieur L.’ ?”

Elle a dit oui. Sans poser de questions. Sans deviner qu’il n’y aurait pas d’autres invités à cette fête.

Une bougie, une photo, un message
De retour chez lui, il a posé le gâteau sur une caisse en bois.
Il a trouvé une vieille bougie dans un tiroir. Une seule.
Il l’a allumée. La flamme tremblait un peu.

Il s’est assis.
Et il a attendu.
Quoi ? Il ne le savait pas exactement.
Un souvenir. Un miracle. Une voix.

Son fils, Éliot, ne l’appelle plus depuis des années.
La dernière conversation remonte à longtemps. Une phrase malheureuse sur la femme de son fils. Rien de bien méchant, mais assez pour briser quelque chose.

Depuis ce jour, plus un mot. Plus une adresse. Plus un message.

Et pourtant, il a sorti son vieux téléphone à clapet.
Il a pris une photo du gâteau.
Et il a écrit :

“Bon anniversaire à moi.”

Puis il l’a envoyée. À ce même numéro. Toujours enregistré sous “Éliot”.

Il n’a jamais cessé d’espérer
Il a mangé une part du gâteau. C’était bon. Léger, sucré.
Le reste, il l’a laissé sur le rebord de la fenêtre. Peut-être que les enfants du voisin aimeraient en avoir un morceau.

Dehors, les bus continuaient de passer.
Le soleil descendait lentement.

Et lui, assis là, pensait.
À ce qu’il aurait pu dire.
Aux mots qu’il aurait dû avaler.
Aux gestes qui, peut-être, auraient tout changé.

Mais il n’avait plus de colère. Ni de rancune.
Juste cette tristesse douce, celle des gens qui ont aimé plus qu’ils n’ont su le montrer.

Et si un jour…
Peut-être qu’Éliot a vu le message.
Peut-être qu’il l’a ignoré.
Peut-être qu’il a pleuré.
Peut-être qu’il ne l’a même pas reçu.

Mais ce vieil homme n’a pas envoyé ce message pour obtenir une réponse.
Il l’a envoyé pour ne pas oublier qu’il aime encore.
Malgré le silence. Malgré les années. Malgré tout.

Parce qu’à 97 ans, il a compris une chose : le vrai amour n’a pas besoin d’un écho pour exister. Il suffit parfois de souffler une bougie, de murmurer “je suis là”, et de continuer d’y croire.

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