Une sueur froide lui glissa le long de la colonne vertébrale. À ses côtés, sa jeune amante lâcha sa main, incapable de détourner le regard de ce qu’elle voyait.
Le salon baignait dans une lumière étrange. Toutes les lampes étaient allumées, comme si quelqu’un avait voulu illuminer chaque coin de la pièce. Au centre, la table était soigneusement dressée : deux verres de vin rouge, deux assiettes recouvertes, et entre elles des bougies qui projetaient des ombres tremblantes sur les murs.
Un dîner romantique.
Mais certainement pas pour eux.
— Tu étais ici avant ? murmura la jeune femme d’une voix brisée.
Il resta silencieux. Le souffle court, la gorge serrée, il avança de quelques pas. L’air était lourd, saturé d’un parfum familier. Un parfum qu’il n’avait plus senti depuis son départ quelques heures plus tôt.
Celui de sa femme.
C’était impossible. Il l’avait lui-même accompagnée à l’aéroport. Il avait vu les agents scanner son billet. Elle lui avait même envoyé un message disant qu’elle attendait l’embarquement.
Et pourtant… quelque chose, dans cette pièce, contredisait tout.
Il toucha un des verres. Le vin était tiède. Pas complètement froid, pas totalement chaud — comme s’il avait été servi il y a peu de temps. Trop récemment.
— Peut-être que quelqu’un est passé… proposa-t-il faiblement, sachant qu’il mentait même à lui-même.

Son amante ne répondit pas. Son regard venait de se poser sur un détail minuscule, mais suffisant pour glacer le sang.
Sur le fauteuil, soigneusement déposé, se trouvait l’écharpe de sa femme.
La même écharpe qu’elle avait laissée dans l’entrée avant de partir. Il s’en souvenait parfaitement. Il l’avait vue lui-même poser ce vêtement sur l’étagère, en disant qu’elle n’en avait pas besoin pour le voyage.
Et maintenant… elle était ici. Propre. Repliée. Exposée presque comme un message.
— Ce n’est pas normal… souffla la jeune femme, reculant d’un pas.
Le mari se dirigea vers la chambre. Une panique froide s’élargissait dans sa poitrine. La pièce semblait intacte à première vue… jusqu’à ce qu’il aperçoive le lit. Les couvertures n’étaient pas comme il les avait laissées. Et sur l’oreiller reposait quelque chose qui l’anéantit.
Le pyjama de sa femme.
Celui qu’elle emportait toujours en déplacement.
Déposé là, soigneusement étalé. Comme si elle venait tout juste de l’enlever.
— Non… ce n’est pas possible… murmura-t-il.
À ce moment-là, un bruit discret retentit dans le couloir. Un clic. Un léger craquement. Un son trop réel pour n’être qu’une illusion. Il se précipita vers le dressing et ouvrit brutalement la porte.
Vide.
Mais la senteur de sa femme flottait encore dans l’air. Forte. Trop fraîche pour dater d’il y a plusieurs heures.
— Je veux partir, dit soudain l’amante, la voix tremblante. Je ne reste pas ici.
Il ne l’écoutait plus.
Ses yeux venaient de se poser sur le miroir du dressing. Et ce qu’il y lut faillit lui faire tomber le téléphone des mains.
Sur la surface du miroir, écrit avec un rouge à lèvres écarlate, se trouvait un message :
« Tu pensais vraiment que je n’allais rien découvrir ? »
Il sentit ses jambes devenir lourdes, comme s’il pouvait s’effondrer d’un moment à l’autre. Les battements de son cœur résonnaient dans ses oreilles.
Puis il remarqua un autre détail.
Sur la table de nuit, posé bien en évidence, il y avait un téléphone. Celui de sa femme. Celui qu’elle avait rangé dans son sac avant de partir. Il le savait. Il l’avait vu.
Il saisit l’appareil. L’écran s’alluma immédiatement.
La photo d’accueil le frappa comme une gifle.
Un selfie.
Sa femme, assise sur leur lit, dans la même chambre.
Le même décor.
La même couverture.
Pris ce soir.
Horodatage : 19 h 32.
Il regarda l’heure sur son propre téléphone.
19 h 59.
— Elle était ici… il y a moins de trente minutes… souffla-t-il.
Un frisson le traversa.
Puis une notification apparut à l’écran.
« Galerie : nouvelle vidéo. »
Ses mains tremblaient lorsqu’il appuya sur lecture.
La vidéo commençait par la porte d’entrée qui s’ouvre doucement.
On voyait sa femme entrer avec son valise.
Elle posait ses affaires, allumait les lampes, préparait la table.
Elle souriait.
Un sourire calme. Trop calme.
Elle s’approcha de la caméra et murmura :
« Si tu regardes ceci… alors je suis déjà loin.
Mais sache une chose…
Je vois tout. »
La vidéo s’arrêta.
Et au même moment…
La poignée de la porte d’entrée se mit à tourner.
Lentement.
Délibérément.
Comme si la personne de l’autre côté savait exactement qu’ils étaient là.
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